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"La cité des anges déchus", par John Berendt

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"La cité des anges déchus", par John Berendt Empty "La cité des anges déchus", par John Berendt

Message par Dominique_R Dim 29 Mar - 20:13

Je suis en train de lire un délicieux "vrai-faux" roman intitulé The City of Falling Angels, par John Berendt (auteur de Minuit dans le jardin du bien et du mal), dont une rapide recherche sur Google m'apprend qu'il a été traduit (mal) en français par La Cité des anges déchus. Le jeu de mots ne fonctionne qu'en anglais, entre fallen angels (littéralement, "les anges tombés" —en bon français, "déchus") et falling angels, les anges "en train de tomber", référence cocasse à un écriteau qui, dans les années 70, alors que l'église de la Salute était si mal entretenue que les statues tombaient des toits du bâtiment, prévenait le public en ces termes : Beware of falling angels !, attention aux anges qui pourraient se casser la figure sur la vôtre... Rolling Eyes Very Happy Laughing

Je ne sais pas quels mots avaient été employés en italien, mais connaissant le sens de l'humour des Vénitiens, j'imagine que ça fonctionnait aussi dans cette langue... clown

Quoi qu'il en soit, voici, traduit par mes soins, un extrait du prologue qui s'intitule L'effet Venise :

"Chacun à Venise joue un rôle, me dit le comte Girolamo Marcello, et ce rôle change. La clé pour comprendre les Vénitiens, c'est le rythme : le rythme de la lagune, le rythme de l'eau, des marées, des vagues...

[...]

"Le ryhtme à Venise, c'est comme une respiration, dit-il. Marée haute, haute pression : tension. Marée basse, basse pression : détente. Les Vénitiens ne connaissent rien au rythme de la roue. Ça, c'est pour ailleurs, pour ds endroits où il y a des véhicules à moteur. Notre rythme est celui de l'Adriatique, le rythme de la mer. À Venise, le rythme s'accorde avec la marée, et la marée s'inverse toutes les six heures.

Le comte Marcello prit une profonde inspiration. "Un pont, ça vous évoque quoi?"

"Pardon ? répondis-je. Un pont ?

"Voyez-vous le pont comme un obstacle, juste une autre volée de marches à gravir pour passer d'un côté du canal à l'autre ? Nous, Vénitiens, ne voyons pas les ponts comme des obstacles. Pour nous, ce sont des transitions. Nous les franchissons très lentement. Ils font partie du rythme. Ils relient deux parties d'un théâtre, comme un changement de décor, ou comme le passage de l'acte un à l'acte deux. Nous changeons de rôle en franchisant les ponts. Nous passons d'une réalité... à une autre réalité, d'une rue... à une autre rue. D'un décor... à un autre décor."

Nous approchions d'un pont enjambant le rio di San Luca et donnant sur le campo Manin.

"Une peinture en trompe-l'œil, poursuivit le comte Marcello, est une peinture qui ressemble tellement à la réalité qu'on ne dirait pas une peinture du tout. On dirait la vraie vie, mais bien sûr c'est inexact. C'est une cousine germaine de la réalité. Et qu'en est-il donc lorsqu'une peinture en trompe-l'œil se reflète dans un miroir ? C'est une cousine issue de germaine ?

"La lumière du soleil sur l'au d'un canal est réfléchie à travers une fenêtre sur le plafond d'une pièce, et de là sur un vase, et du vase sur un verre, ou sur un bol en argent. Quelle est la véritable lumière du soleil ? Quel est
le véritable reflet ?

"Qu'est-ce qui est vrai ? Qu'est-ce qui ne l'est pas ? La réponse n'est pas si simple car la vérité peut varier. Je peux varier. Vous pouvez varier. C'est ça, l'effet Venise."

Nous redescendîmes du pont pour traverser le campo Manin. À part le fait d'avoir quitté l'ombre profonde de la calle della Mandola pour l'éclatatnte lumière qui baignait la place, je ne ressentais en moi aucun changement. Le rôle que je jouais, quel qu'il soit, était le même que celui qu'il avait été avant de franchir le pont. Bien entendu, je ne m'en ouvris point au comte Marcello, mais je l'observai pour voir s'il allait admettre avoir lui-même changé.

Il prit une profonde inspiration comme nous traversions le campo Manin. Puis, qur un ton définitif, il dit : "Les Vénitiens ne disent jamais la vérité. Nous pensons exactement le contraire de ce que nous disons."



Voilà qui, je l'espère, va vous inciter à lire ce livre qui —je m'aperçois que j'ai oublié de le dire— se présente sous l'apparence d'une enquête quasi-policière à la suite de l'incendie de La Fenice, ce qui n'est probablement qu'un écran de fumée (si j'ose dire !) pour nous entraîner dans les sombres méandres d'une Venise inconnue, très loin des itinéraires touristiques habituels...

Pour ma part, je m'en vais de ce pas lire la suite... Wink

"La cité des anges déchus", par John Berendt Fenice
Dominique_R
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